Ces gens dont je partage le quotidien.
Jusqu’à présent je vous ai beaucoup raconté ce qui se passait ici, assez peu qui étaient les gens incroyables avec lesquels je vis depuis près de 2 mois. Je vis donc dans le village de Colibantan près de la frontière gambienne. Cette région est peuplée entre autre par l’ethnie mandingue qui est presque exclusive dans le village de Colibantan.
Le peuple Mandingue
Les mandingues représentent environ 4% de la population sénégalaise mais sont implantés de façon plus importante en Gambie, Guinée, Mali, Côte d’Ivoire. Ce groupe a une histoire vieille de plus de 4000 ans ! Il vivait alors au sud du Sahara et était très réputé pour ses chasseurs et ses guerriers. Il s’agit d’un des premiers peuples d’Afrique à se convertir à l’Islam au XIème siècle. Au milieu du XIIIème siècle ils fondèrent l’un des plus grand empire d’Afrique : l’empire du Mali qui régna jusqu’au XVème siècle sur une immense partie de l’Afrique de l’ouest.
Les marabous
L’islam mais aussi l’héritage traditionnel codifie la vie des villageois. Dans tout le Sénégal existe des marabou. Ces personnages ont une influence énorme sur la population musulmane. Ce sont de grands connaisseurs de l’islam généralement issus de la famille du prophète Mohammed ou de celle de ses disciples. Il est indispensable, par exemple, pour les hommes politiques d’avoir le soutient d’importants marabous qui sont synonymes de votes. Ainsi à la télévision sénégalaise j’ai pu voir un marabou distribuant des chèques en contre partie d’une promesse de vote pour le président. Outre cette influence politique le marabou est une autorité morale auprès duquel on recherche l’arbitrage des conflits ou encore des conseils.
Le marabou peut aussi, moyennant finance, réaliser des grigris, pendentifs renfermant des passages du coran que tous les sénégalais musulmans possèdent et portent en protection.
Les castes chez les mandingues.
Dans la majorité des ethnies africaine un système de castes existe. On distingue ainsi les familles nobles, des familles esclaves. Entre ces deux extrêmes se trouve les artisans et les griots, chanteurs et musiciens traditionnels détenteur des contes et traditions. Les forgerons et cordonniers ont un rôle social tout particulier. Ainsi ils sont sollicités pour arbitrer des conflits, bénir des familles, des maisons ou encore faire les entremetteurs pour les mariages. Khalipha me racontait la création du quartier de tambaaconcorong dans lequel nous vivons. Ses grands parents de la famille Athie, noble, on construit leur case et ont fait venir la famille Dramé des forgerons et la famille Camara, alors leur esclaves.
Aujourd’hui l’esclavage est supprimé au Sénégal. Malgré tout l’héritage de ces castes est encore très présent. Ainsi il est impossible de se marier avec une personne issue d’une caste différente ou encore d’exercer un métier qui ne correspond pas à sa caste. Ainsi Aziz le fils de Khalipha ne pourra être ni forgeron ni cordonnier ou encore épousé une Dramé ou une Camara ! De même personne ne penserais demander la main d’une fille à ses parents sans passé par l’intermédiaire par exemple de Lamine Dramé le forgeron.
Si ces règles sont bien présentes dans le village dès que les villageois le quittent ils sont libérés de cette influence. C’est pourquoi on verra des Athie cordonnier en ville sans aucun problème !
De plus la réussite social et l’émigration brouillent aussi ces castes. En effet avec l’expatriation d’un seul membre de la famille (surtout vers l’Espagne) ce sont des dizaines de personnes qui voient leur quotidien s’améliorer. Dans certaines familles plusieurs hommes ont franchis le pas, ils peuvent faire construire dans ce cas des maisons en briques et les aménager parfois de façon moderne. Dans ces familles il n’est pas rare que la maison soit équipée de frigos mais aussi d’écrans plats !!
La structure familiale
Une des différences les plus importantes entre nos cultures est la structure familiale. Ici une famille c’est 30 personnes : le grand-père et ses femmes, leurs fils et leurs femmes et leurs enfants. La polygamie conduit à séparer dans la vie quotidienne les hommes et les femmes. Ceux-ci travaillent et mangent séparément, leurs tâches sont bien distinctes et assez hermétiques. Une femme peut se marier aux alentours de 16 ans alors qu’un homme ne peut se marier sans avoir réunie une forte somme d’argent. Ainsi les frais liés au mariage puis à l’entretient d’une famille sont très importants. Cette situation de fait à pour conséquence de voir des mariages avec une certaine différente d’âge entre les époux. Il est impressionnant de voir à quel point les jeunes filles de 16 ans sont déjà des femmes ici quand elles sont de jeunes adolescentes chez nous. Quoi qu’il en soit les familles sont très soudées et vivent constamment ensemble, les repas se partagent à une petite dizaine autour d’un grand plat.
La Athiecounda
La famille Athie s’est installée à Colibantan il y à quatre générations. La famille s’agrandissant elle s’est séparée en plusieurs familles aux liens plus resserrés. Ma famille vie sous l’autorité de deux oncles de Khalipha, deux jeunes frères de son père. Nous sommes ainsi trente personnes de un an et demi à environ 70 ans, à partager joyeusement le quotidien. La famille ne vie évidemment pas refermée sur elle-même et les voisins Dramé, Camara et Condira sont aussi toujours présents. La chaleur humaine est toujours au rendez-vous !
La case des tout petits
« A la case des tout petits, c’est ici que l’on apprend avec nos amis pour devenir grands » ! Les élèves en culotte courtes de la case des touts petits continuent à bien se porter. La collaboration entre Seïdi et moi se passe très bien. Les enfants continuent à apprendre de nouvelles comptines et chansons ! Il y à même eu une distribution de bonbons et de grandes danses pour fêter mon départ !
L’opération de vaccination
L’état sénégalais développe plusieurs politiques de sensibilisation et de préventions contre diverses maladies frappant les populations des zones enclavées et peu protégés. Une de ces maladies est la filariose, il s’agit de l’invasion de vers dans les jambes qui les font salement gonfler. Avec deux personnes du village travaillant à l’hôpital de Maka, Tida et Lamine, mais aussi avec l’aide de Kélo nous avons sillonné pendant trois jours tout le village pour administrer un traitement préventif. Nous nous déplacions avec un grand baton divisé en quatre parties, avec lequel nous prenions la mesure des gens. Selon la taille une dose était administrée. L’opération concernant l’ensemble des villageois elle permet de faire un semblant de recensement de la population.
Pour moi c’était surtout l’occasion d’explorer les moindres recoins de mon village ! J’ai pu alors constater les écarts des niveaux de vie des familles. Il y à celle dont l’un ou plusieurs des membres sont expatriés et celles qui n’ont pas cette chance. Il y à les maisons en briques et les cases au toit de chaumes.
L’attaque du jardin
Rien ne va plus, le jardin a été attaqué !! En effet un beau matin en nous rendant au jardin nous avons découverts des pieds d’oignons sur la route du jardin. En fait quelqu’un c’était introduit la nuit dans le jardin pour y arracher des pieds de carottes et d’oignons mais aussi vider tout le château d’eau. Nous avons essayé de mener l’enquête mais personne n’a rien vu…
Cet acte illustre un des paradoxes de l’Afrique extrêmement difficile à comprendre pour moi. Alors que le continent a besoin de se développer, la réussite est très vite jalousée et de nombreuses initiatives sont ainsi freinées par des actes malveillants. J’ai pu constater ce phénomène à de nombreuses reprises même si les dégradations du jardin représentent vraiment un cas extrême.
Des tas de gens sont pleins de motivations et de bonnes intentions, engagés sincèrement dans le développement. Toutefois de petites choses peuvent polluer et décourager ces dynamiques.
Il en va de même pour la corruption présente assez rapidement dans les rapports avec l’administration. Le terme de corruption est certainement excessif pour refléter la situation du terrain mais un ensemble de petites manœuvres, de petits chantages qui se cumulant deviennent un frein important au développement.
La mise en place du goutte à goutte
Heureusement de tristes épisodes comme celui des dégradations au jardin sont rares comparés à toutes les belles choses qui se passent ici. Ainsi pour compléter le système du JTA dont j’ai déjà parlé nous avons installé au jardin un système de goutte à goutte. Ce système inventé par un expert de la FAO et permet de l’installer avec un minimum de matériel et de frais.
L’ambiance est toujours autant au rendez-vous lorsque les femmes viennent arroser leurs oignons !
La visite de Mariame et Sankoun
Le mois de décembre a notamment été marqué par la visite de Sankoun et Mariam au village. Sankoun Yock originaire de Colibantan a fait la rencontre d’Anne membre de l’association nantaise Colibantan en Espagne puis ils se marièrent et eurent trois enfants !! Mariam vit au Havre où elle côtoie des familles sénégalaises originaires du nord du pays. Par un hasard de calendrier Mariam et Sankoun sont arrivé en même temps au village pour y passer une semaine.
Une semaine durant laquelle je n’étais plus le seul toubab du village ! C’était très agréable de converser avec des compatriotes et d’avoir des nouvelles fraiches de l’hexagone !
Noël
Le village de Colibantan étant exclusivement musulman Noël n’est pas fêté comme dans la majeur part du Sénégal. Malgré tout le père noël ne m’a pas oublié car il m’a offert un bon palu pour l’occasion. En effet vendredi 23 alors que nous fêtions avec Seïdi et les enfants de la case des touts petits l’arrivée de la semaine de vacance scolaire je me sentais bof bof. Fort heureusement je suis équipé d’un thermomètre, et c’est fort d’un 39,5 de fièvre que je me suis rendu après la prière du vendredi vers 16h00 à l’hôpital de Maka. J’ai pu à cette occasion me peser et constater l’indiscutable efficacité du régime africain, bien plus efficace que eight etcher. Pesant aujourd’hui 74 kg j’ai donc perdu près de 13 kg depuis mon départ le 25 septembre dernier !
Après une bonne piqure je suis rentré à Colibantan avec une plaquette de quinine à prendre sur trois jours pour tué le palu !
Bref, j’ai passé un joyeux noël !
Le nouvel an
La religion musulmane connait un calendrier différent du notre. Ainsi comme je l’ai déjà décris le nouvel an musulman se déroule le 7 décembre et s’appelle le tamkarat.
Toutefois le passage à la nouvelle année est fêté dans tout le Sénégal notamment à l’initiative des jeunes. Ainsi les jeunes femmes de la « Athiecounda » la « maison des Athie », Kélo et moi nous sommes cotisé pour organiser de petites festivités. Ainsi nous avons pu avoir de la viande pour le midi et le repas du soir. Nous avons pu aussi déguster boissons sucrées ; bonbons ; gâteaux mais aussi trempé du pain dans du lait très sucré. La journée était vraiment sympa et nous avons bien veillée. Malheureusement l’absence de courant la nuit (devenu très fréquente ces dernier temps) fera tourner court à la fête. Ainsi tout le monde ou presque est partie se couché à quelques minutes de minuit…
Il faut dire que nous étions un peu fatigué par la fête de la veille ! En effet la notion du temps en Afrique est pour le moins relative. Les jeunes de Colibantan ont organisé la fête du 31 le 30 ! Il n’y a au village qu’une seule chaine hifi ; or cette dernière avait été réservée avec le DJ par un village voisin le soir du 31. Aucun problème pour les jeunes de Colibantan qui ce sont ainsi déhanchés jusqu’à 5h00 du matin au centre du village qui n’a pas du beaucoup dormir vu la puissance des enceintes… Pour ce qui est de la bande son, Mohammed le DJ officiel de toute les soirées est équipé de bons logiciels sur son ordinateur et possède un bon registre de musiques autant occidentales qu’africaines, un vrai bonheur, sauf pour les voisins !!! (J’ai une nouvelle fois dansé le chilili)
Visite en Gambie
Chaque lundi se tient en Gambie, à une vingtaine de kilomètre du village un grand marché. Je suis parti en charrette pour ce fameux marché de Sarangaï, une expérience vraiment sympa. Outre le marché haut en couleur aux échoppes odorantes et coloré c’est surtout le transport qui m’a marqué. 1h30 de charrette allé, départ à 6h30, 1h30 de charrette retour. Les pistes pour se rendre en Gambie ne sont pas des plus nettes et même si ce voyage a eut lieu il y à maintenant 15 jours, mes fesses s’en rappellent encore !!
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